Un bivouac qui claque :
Chassez le naturel, il revient à vélo !
C'est par un chaud matin d'été qu'une petite
troupe hétéroclite prit la route, avec une heure
et demi de retard, disposée à vivre un week-end
mémorable : pourquoi partir à la
fraîche alors que l'on peut pédaler en plein
cagnard ? Même pas mal !
Une partie de la troupe ayant festoyé toute la nuit, suite
à la Vélorution de la veille, mesura
dès les premiers kilomètres l'ampleur de
l'épreuve. Notre Robert international, harnaché
comme un chameau, muni de ses tongs fétiches, ouvrit la
marche en mode tonton du bled, suivi de près par un Adriano
au taquet. Fier de son vélo d'opérette,
prêté pour l'occasion, sur sa selle en
collagène qu'il n'hésita pas à
comparer à une prothèse mammaire, il descendit et
monta, avec le même entrain, nombre de reliefs... dans un
premier temps du moins... En effet, notre athlète
préféré déchanta aussi
rapidement qu'il s'était enthousiasmé :
contraint de pédaler tout autant dans les descentes que dans
les montées, il commença à
dénigrer sa monture... Vexée, celle ci lui
opposa, dans la nuit, une crevaison lente comme unique
réponse... Certains soupçonnent encore le revivor
de la bande, qui, le cutter entre les dents, aurait
été pris d'un élan revanchard
nocturne...
Les pauses se succédèrent, alternant
spots bucoliques, au bord de cours d'eau ou dans la pampa, et
d'autres moins poétiques tels des supermarchés
climatisés.
D'ailleurs, cette première pause se
révéla un peu longue à la reprise du
biclous. Les pédaleurs en folie, ne voulant pas s'avouer une
nouvelle dépendance à la clim ainsi qu'aux joies
de la dégustation de mini-glaces et sodas,
multiplièrent les sujets de tergiversation propres
à retarder le départ... Ça n'est
qu'après avoir ravitaillé près d'Auriol notre
bidoche en sandwiches, saucissons et salades fraîchement
achetés auparavant dans notre discount fétiche,
partenaire officieux de l'aventure, que nous
redémarrâmes promptement. Et si les surplus de
victuailles amassées par certains dans des sacs de
supermarché mal arrimés valut encore quelques
ralentissements imprévus autant que prévisibles,
cela n'entama en rien l'énergie de la troupe,
menée à un train d'enfer par une
Émilie toute reboostée par le repas
dans la montée essoufflante et torride qui nous
menait à Saint-Maximin.
Seul Luc, qui, reprenant le vélo après une longue
pause, s'était joint à la bande à
l'improviste, les mains dans les poches sans même une
bouteille d'eau, et semblait prêt à rendre
l'âme dès la première
montée, avait décidé sur les conseils
de tous de faire demi-tour et de revenir tranquillement en train...
C'est du moins ce qu'il nous fit croire, jusqu'à ce
qu'il réapparaisse frais et dispos, à la
surprise générale, dans le
supermarché local prétexte à une
dernière pause avant l'arrivée sur le site des
cascades.
L'équipe de bras cassés à nouveau en
selle, Emilie prit la tête, persuadée de
connaître le chemin à suivre pour cette ultime
étape, avant de s'apercevoir au village de Brue-Auriac
qu'elle avait innocemment rallongé l'itinéraire
d'une dizaine de kilomètres. Ce n'est que sur la fin qu'elle
eut la brillante idée d'appeler un de ses contacts
st-maximinois afin d'obtenir d'éventuelles informations nous
permettant d'arriver à bon port et surtout de remotiver
quelques découragés qu'on entendait
brièvement bougonner dans leur moustaches…
Une fois, le spot trouvé, ils nous fallait franchir une
dernière étape : le cheminement jusqu'aux
fameuses cascades de l'Argens. Une descente par un étroit sentier
commençant par un déboulé acrobatique,
puis une pampa jonchée de roches et branchages aux airs
d'Amazonie, suivie d'un embouteillage de vélos dans une
raide tranchée qui obligea certains à rebrousser
chemin pour garer les bicyclettes d'une manière moins
barbare.
C'est alors, que ceux qui avaient déjà
balourdé leurs biclous se
précipitèrent dans ces bains bouillonnants d'eau
fraîche, suscitant la curiosité des moins
explorateurs et regroupant fièrement notre troupe sur les
bords humides et poreux sur lesquels nous essayâmes plus tard
de dormir.
A noter que l'ami Arnaud, parti plus tard, réussit l'exploit
de nous retrouver en pleine nuit, au bord des cascades, en contrebas de
la forêt, armé de sa lampe frontale et de
son GPS intégré au cerveau, et nous offrit
sitôt arrivé un spectacle d'exploration nocturne
de la rivière à la nage.
Andy, ayant pris soin de retirer dérailleur et vitesses de
son vélo, n'a pas moins
démérité, nous retrouvant le lendemain
à l'aube dans le village après avoir
monté le col de l'Espigoulier, l'itinéraire que
nous avions décidé de ne pas prendre à
l'aller pour cause de difficulté... Comment dit-on fou en
allemand ??
Un petit mot pour Raf', également, le champenois nomade sans
lequel ce bivouac n'aurait pas eu la même saveur : saluons
son humeur égale durant ces deux jours. Volontaire et
agréable, distillant subtilement sa zénitude, il
fit fonction de régulateur dans ce petit groupe
d'agités.
Nous ne ferons pas l'impasse sur cet imposteur de Willy dit
« Gad el mollets », qui, tel
Rahan, une quenotte autour du cou et un pagne de castor pour unique
vêture, avait rassuré une Julita peu
téméraire avant l'épopée :
« T'inquiète, je suis là, moi
les bois, ça me connaît ! ». Et c'est
ainsi que l'aventurier fit l'objet des sarcasmes du groupe en
grelottant toute la nuit, n'ayant pas jugé bon d'amener un
sac de couchage. Mais les moqueries redoublèrent le
lendemain lorsqu'il dégaina son paquet de lingettes pour
bébé… Allez Gad, si tu renonces
à t'expatrier à Madagascar, promis, l'anecdote
restera entre nous... On se contentera de propager celle où
Adriano essaya d'allumer un feu de bois avec un kleenex
après avoir maintenu un discours redondant sur son
savoir-faire en allumage de feu…
Adriano, victime d'un vélo qui avait tout misé
sur son physique, fantasmait sa nuit en hamac... et de nous vanter les
qualités divines de sa paillasse... Il fit preuve d'un
prosélytisme sans borne, insistant même pour faire
essayer sa pépite... Julita, peu convaincue, tenta
l'expérience et eut bien du mal à s'en extirper.
Son propriétaire s'y lova avec délectation,
cherchant les bras de Morphée en position
foetale… durant une heure tout au plus ! L'homme
des bois, transi de froid, rejoignit rapidement Gad El Mollets et Raf'
l'amanite, réduits à l'état de mister
freeze, dépourvus de duvet.
A choisir entre mourir de rire ou de froid, le trio gagnant opta pour
la première solution, réveillant l'autre partie
du campement à peine endormie. Difficile d'avoir pour les
trois acolytes un quelconque ressentiment, leur rire nerveux devenant
contagieux pour certains et irritant pour d'autres. En effet, ceux-ci
déclenchèrent une salve de protestations
provenant des
« soeurs Tornade »
tapies en position lune dans la tente de plage gentiment
prêtée par Rob à la pensée
des conditions primaires et préhistoriques
qui attendaient nos nouvelles baroudeuses du dimanche.
Néanmoins, l'humour potache de ces malins eut raison des
plus réticents et des plus agacés. À
noter que le festin odorant à base d'échalotes,
pâté et camembert en fin de vie eut raison des
tensions entre le clan des jaunes et celui des rouges et scella la
réunification des tribus.
Sans oublier les gémissements et pleurnichouilles de notre
très chère Julita, persuadée pour
avoir trop écouté on ne sait quel conteur
marseillais de l'existence de ragondins croqueurs d'oreilles et friands
de jeunes damoiselles apeurées... Vous pouvez donc imaginer
son cri lorsqu'en pleine nuit elle prit le pied baladeur
emmitouflé dans une vieille chaussette d'un de ses voisins
pour une de ces bêtes poilues et malodorantes, sortie d'un
marécage maléfique !
Le lendemain un petit bain revigorant dans la cascade
précéda le départ. Un p'tit
déj échelonné pour les retardataires
et une organisation méthodique de fourmilière
s'en suivit jusqu'à ce que tous les membres de la troupe
reprennent lentement mais sûrement le petit chemin qui nous
éloigna peu à peu de ce spot idyllique propageant
déjà des ondes de nostalgie.
Adriano, au réveil, entortillé tel un esquimau,
la goutte au nez et à deux doigts de revendre son hamac,
mijotait certainement, dans un coin de sa caboche encore endolorie par
les racines abracadabrantes qui bordaient le campement, sont projet
d'évasion... En effet, lorsqu'une partie de la troupe
décida d'accélérer le train du retour
pour ne pas rater celui (de train) qui les attendait le soir pour la
Hongrie, il préféra nous abandonner pour
rentrer en bus en fin de matinée.
Emi et Audrey, les frangines indomptables, comme toujours le courage
chevillé au corps, en tête des
« retardataires », en
scotchèrent plus d'un par leur
ténacité.
Alors c'est vrai, il y eut bien une tentative d'évasion en
stop de l'une d'elle, mais sans succès... Les conducteurs,
à la vue du peloton de bras cassés qui suivaient
de près la belle, flairairent l'arnaque, imaginant sans
doute qu'il s'agissait d'un appât menant à charger
toute l'équipe et ses biclous dans leur voiture.
Ainsi, au lieu de ralentir à la vue du cortège
véloutuliste, ils
accélérèrent sans un brin
d'hésitation. Il faut dire que cette montée
cagnardeuse en ébranla plus d'un : Emilie qui
roussissait par le soleil acharné sur sa pauvre peau fragile
et qui ne cessa tout au long de ce périple de revendiquer
les bienfaits de la crème solaire, mais aussi Robert dont la
roue arrière perdait ses rayons un à un,
jusqu'à ce qu'elle se déglingue
complètement à 20 mètres de
l'arrivée au local de Vélo Utile.
Il sera aussi important de signaler le regroupement inattendu de la
tribu à l'Hostellerie de la Sainte-Baume où l'on
eut l'occasion de contempler la Grotte de la Sainte-Marie Madeleine,
pique-niquant joyeusement dans l'herbe à
côté du restaurant fréquenté
par les touristes.
Le repas terminé, le premier groupe reprit sa course contre
la montre tandis que le deuxième s'accorda une quarantaine
de minutes pour faire reposer mollets, cuisses et fessiers quelque peu
éprouvés.
La montée du pic de l'Espigoulier se déroula dans
un élan de remotivation, et fut
récompensée par la descente grisante... Un peu
trop d'ailleurs pour Emilie qui fit un beau dérapage et en
fut quitte pour quelques bobos cuisants mais heureusement sans
gravité, et qui reprit immédiatement sa course.
Arrivés à Gémenos, Andy et
Arnaud ne trouvèrent rien de mieux pour se
rafraîchir que se baigner gaiement sous la cascade
d'une fontaine publique, sous l'oeil amusé des badauds...
Après quoi Andy alias Moogli l'allemand, toujours en manque
d'activité sportive, grimpa au sommet d'un platane
de plus de 20 mètres de haut.
Pour finir, la dernière ligne droite s'effectua dans une
ambiance assez vive et engagée, surtout par l'envie de
rentrer « en su casa » et d'y
retrouver le doux confort d'un vrai lit. Concernant le premier groupe,
Gad el mollets et son compère Raf terminèrent
l'aventure dans un esprit déterminé et furent
rentrés à temps pour prendre leur train, laissant
derrière eux Julita et sa roue crevée
à la gare d'Aubagne... « On ne change pas
une équipe qui perd ! »
En revanche on s'attardera davantage sur les remerciements à
tous les participants de ce week-end end pas comme les autres, durant
lequel chacun, avec sa personnalité, à fait
preuve d'entraide, d'abnégation et de bonne humeur : les
zamis, spéciale cacedédi !
Texte : Julie, Émilie et
Robert
Photos : Julie, Willy et Arnaud
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